Sortir Bordeaux Gironde : La musique chez toi, question de précocité.
Izïa :
En fait, j'ai commencé très vite à toucher au piano, puis je me suis mis à chanter (on parle de duos improvisés avec son père), à jouer de la gratte... un peu comme tout le monde quoi. Mais surtout quand j'étais gamine, à la maison, mes parents écoutaient beaucoup de choses, des Beatles à Barbara, ça m'a permis de goûter à une culture musicale très large. Et même si ado, mon truc à moi, c'était plutôt Britney Spears ou Shakira... ça faisait hurler mon père mais je kiffais. Et puis à 14 ans, ça a été mon premier festival, beaucoup de rencontres avec des gens qui écoutaient des choses plus rock : du coup, j'ai bifurqué vers Muse, Led Zep' et Nirvana. Le tout avec le collier à pics et le sac Eastpak, une vraie tête à claques !

Sortir : Et puis cette première scène improvisée, au Cabaret Sauvage...
Izïa :
En fait, le patron de l'époque était un bon ami à mon père. Un soir, comme il savait pour mes petites compos, il m'a proposé de monter sur scène : je fais mon truc (Life is going down, que l'on retrouve sur l'album) et là, il se passe quelque chose avec les gens présents. Du coup, le patron décide de me programmer pour un festival qui devait avoir lieu sur la même scène quelques mois plus tard : ça m'a obligé à monter un groupe et à écrire de nouvelles compos afin de pouvoir assurer un set d'une demi-heure minimum. Derrière, on a continué à bosser nos compos et tout s'est enchaîné...

Sortir : Jusqu'à ce premier album.
Izïa :
Aujourd'hui l'équipe (les musiciens) a changé, mais c'est vraiment hypergratifiant d'avoir réussi à faire ce truc-là. Au final 12 titres rock, du rock libre, brut et spontané, balancé sans se poser de questions, le rock que j'aime quoi. Quelque chose d'à la fois hyperje-m'en-foutiste et très contrôlé.

Sortir : Et tes textes, tes compos ?
Izïa :
C'est très varié, avec des choses écrites à 13-14 ans, même si la plupart ne me ressemble plus vraiment aujourd'hui... En fait, j'ai une façon d'écrire assez particulière, qui parle davantage de la mélodie que du texte : au départ, je chante ce que m'inspire la musique, avant de re-travailler le truc derrière. Au final, ça donne quelque chose d'hypersignificatif de ce que me fait ressentir la chanson. Si tu prends Let me alone, le premier couplet installe la situation (une nana seule dans sa chambre), puis au fur et à mesure, ça monte en intensité musicalement jusqu'à ce qu'elle se lâche : laisse moi tranquille !!!! En fait, elle dit ça parce qu'elle a envie d'avoir quelqu'un près d'elle...

Sortir : C'est ta première grosse tournée ?
Izïa :
Ça fait 2-3 ans qu'on joue sérieusement et qu'on tourne pas mal, on a fait les festivals d'été... Là, on va être un peu dans le même rythme, mais l'hiver, avec énormément de dates : c'est éprouvant, évidemment, mais c'est un rythme qui me plaît, balances, hôtel, café, concerts, hôtel, boire un coup avec les potes... T'as pas le temps de réfléchir, t'es dans ta musique, tu te prends pas la tête avec les merdes du quotidien, c'est hyperagréable. Et puis j'aime pas être tout le temps chez moi, à Paris.

Sortir : Et ton parcours, tu le vois comment ?
Izïa :
Je me poserai la question quand j'aurai 60 ans ! Non, franchement, c'est passé super vite, on se rend pas vraiment compte... j'ai l'impression que le Printemps de Bourges, c'était hier. À l'inverse, je ne sais pas vraiment où je serai dans trois ans : ça peut être encore plus énorme comme ça peut être complétement oublié, par exemple si le deuxième album est un flop... Ce qui est sûr, c'est que pour ce deuxième album, l'idée, c'est de faire quelque chose de mieux écrit, de plus réfléchi.

Sortir : Et ton statut de "fille de" ?
Izïa :
Eh ben ça se passe très bien ! En fait je m'en fous, pas de problème avec ça, je suis sûr de mes racines, j'adore parler de mon père. D'ailleurs, j'en ai parlé avec d'autres "fils de" : si on a été attiré par ça et si on en est là aujourd'hui, c'est aussi parce qu'on a baigné dedans, parce que nos parents nous ont transmis cet amour pour la musique et poussé à développer notre sens artistique. Il y a énormément de talents, entre les chanteurs, les comédiens, c'est pas du piston ! Douter de cela et pointer les "fils de", plus généralement cette jalousie, le fait de ne pas accepter le succès, c'est quelque chose de très français. Pour faire de la musique en France, il faut rester dans l'ombre toute sa vie et être reconnu par une élite, alors que dès que tu commences à passer à la télé, on te colle la mauvaise étiquette. C'est chiant...